Hybridation des organisations entre travailleurs salariés et indépendants, télétravail, individualisme et disparition de la notion même de “carrière”… Dans cette « reconfiguration du monde du travail » déjà largement amorcée, l’Apec Occitanie a tenté de comprendre les grandes dynamiques à l’œuvre, s’appuyant sur des enquêtes internes et externes. L’Agence pour l’emploi des cadres a présenté ses résultats le 2 juillet à Toulouse, dans le cadre d’une matinée d’échanges avec les entreprises régionales.
Concernant le télétravail, et malgré « une tendance à revenir dans un cadre plus resserré », avec un à deux jours de distanciel par semaine, il reste largement plébiscité par les cadres. « 86 % d’entre eux attachent une grande importance à leur équilibre entre vie pro et vie perso », indique Cyrille Longuépée, Déléguée générale de l’Apec Occitanie.
En parallèle, alors que l’on assiste à une « explosion » du travail indépendant, la plateformatisation s’installe durablement. Comment repenser le collectif quand l’individualisation devient la norme ? « Le management doit s’adapter, le dialogue social évoluer », appelle de ses voeux Cyrille Longuépée. Dans un monde où les repères ne cessent de bouger, « l’important est de ne pas figer les modèles », résume-t-elle.
Enfin, 95 % des actifs de moins de trente ans estiment important d’exercer un métier qui a du sens ; pourtant, « contrairement une idée simplificatrice, cette quête de sens ne concerne pas qu’une seule génération », affirme la déléguée.
La quête de sens, un mythe générationnel ?
Après le Covid, la Grande démission . « Plutôt une Grande rotation », nuance Maëlezig Bigi, maîtresse de conférences au Cnam, qui la relie avant tout à la reprise économique post-crise. Quant au phénomène de « démission silencieuse », de ces travailleurs qui se contenteraient désormais de faire ce que l’on attend d’eux - mais surtout pas plus -, il reflèterait essentiellement la préoccupation croissante des employeurs concernant l’engagement de leurs salariés. En particulier ceux de la Gen Z, réputés moins loyaux, moins impliqués ? « Les enquêtes ne le montrent pas », réfute-t-elle, s’appuyant notamment sur l’étude TraCov2*. « Ce qui différencie les plus jeunes de leurs aînés, ce sont surtout leurs mauvaises conditions d’emploi, leur taux de chômage extrêmement élevé et leur précarité », analyse la chercheuse, qui pointe une « insécurité au sens très large » des jeunes travailleurs, dans l’impossibilité de se projeter dans une carrière, surexposés au travail physique et en mal d’autonomie.
Le travail de l’Apec Occitanie s’inscrit dans une réflexion nationale, menée en collaboration avec les agences de Bordeaux, Nantes et Lille. « On imagine le monde du travail en 2030, bouleversé par quatre “chocs” : démographique, numérique, écologique et le travail transformé. L’idée est d’identifier les opportunités mais aussi les risques auxquels on s’expose en ne changeant rien dans nos organisations », détaille Cyrille Longuépée.
Les résultats régionaux compilés seront présentés en octobre à Paris.
Marie-Dominique Lacour
*Etude réalisée par le ministère du Travail pour mesurer l’impact de la crise sanitaire sur les conditions de travail et la santé des travailleurs.
Photo : Maëlizig Bigi (Centre national des arts et métiers) était le 2 juillet à Toulouse, invitée par l’Apec Occitanie dans le cadre d’une matinée d’échanges sur le "travail transformé". M.-D.L./ToulEmploi