
L’entreprise toulousaine WebSourd a inauguré, le 14 juin dernier, le service JobSourd : le premier site pour l’emploi 100% accessible aux personnes sourdes et malentendantes. « Un service unique au monde, précise François Goudenove, le p-dg de WebSourd. Nous souhaitons ainsi libérer la parole de cette population en rendant les offres d’emplois accessibles aux personnes sourdes grâce notamment au service de traduction intégré – langues des signes française / français. » Les chiffres sont parlants : la France compte 4 à 5 millions de personnes sourdes et malentendantes, parmi lesquelles on recense 500.000 sourds profonds. Or une forte proportion de cette population est éloignée de l’éducation, de l’emploi et de la formation. « 2/3 des sourds et 1/3 des malentendants sont sans emploi. 15% y ont même totalement renoncé. Notre société vise depuis sa création à utiliser le potentiel des technologies de l’information et de la communication pour faciliter leur intégration dans la société française. »
« La première langue des sourds n’est pas le français »
De cette logique est né JobSourd, qui facilite la relation entre les entreprises et les demandeurs d’emplois sourds. « Nous avons travaillé sur trois éléments importants : l’accessibilité, le cœur de notre mission, l’accès aux informations sur l’emploi, et la mutualisation des coûts. Ce projet a donc été mené à quatre mains pour travailler sur le contenu du site, mais également son financement avec la Maison de l’Initiative, des entreprises partenaires, les acteurs de l’insertion professionnelle (l’Agefiph, Cap Emploi...), le réseau des structures de l’accessibilité pour les sourds, et la communauté des sourds. » ERDF fait ainsi partie des entreprises qui ont soutenu le projet financièrement. Comme le souligne, Alain-Patrick Robinson, responsable de la question du handicap dans la division Sud-ouest de la société, « nous avons été enthousiasmés par le projet. Nous allons ainsi pouvoir traduire nos fiches métiers en langue des signes et faire connaître nos offres auprès d’une population jusque là difficile à toucher ».
« La principale problématique est d’accompagner les personnes sourdes en gardant à l’esprit que leur première langue n’est pas le français, mais la langue des signes, et que donc la finesse de compréhension des annonces ou l’écriture d’une lettre de motivation peut être compliquée par ce facteur », rappelle François Goudenove. JobSourd permet donc, pour les candidats, la mise en ligne d’un CV en langue des signes ou en français. « Elles vont ainsi être enfin en capacité d’exprimer qui elles sont vraiment. » Les entreprises bénéficient, elles, contre un abonnement annuel d’une traduction des offres d’emploi en langue des signes, de leur diffusion, de la traduction en français des candidatures associées à des offres, et de l’accès à une CVthèque. « Nous leur proposons également un accompagnement durant la procédure de recrutement. »
L’expérimentation est aujourd’hui lancée en Midi-Pyrénées, et sera étendue au niveau national dès le mois de septembre. En outre, à partir du mois d’avril 2013, des sessions de vidéo-recrutement seront ouvertes.
Agnès Frémiot
[(
« Des barrières nombreuses pour trouver un emploi »
Alexis, qui recherche un poste d’infographiste depuis trois ans, a témoigné lors du lancement de JobSourd, de l’utilité que le service aurait pour lui à l’avenir : « Jusque là, les barrières étaient nombreuses pour moi au moment de l’envoi de la candidature. J’avais du mal à construire une lettre de motivation en rapport avec le poste proposé. De plus, il est difficile pour un sourd de se présenter lors d’un entretien d’embauche face à un entendant. Il faut payer un interprète pour cela. Enfin, il m’était impossible d’appeler comme les autres candidats pour avoir un retour sur mon entretien. » En effet, comme l’a rappelé François Goudenove, le p-dg de WebSourd, « ce service s’adresse à la fois aux jeunes en recherche d’apprentissage qui jettent l’éponge faute de réponse adaptée, à la population qui va d’échec en échec dans sa recherche d’emplois mais aussi aux gens déjà dans l’emploi qui n’osent pas en bouger, et qui sont ainsi stoppés dans leur évolution professionnelle. »
)]