Toulouse vient d’être élue en dixième position des destinations à ne pas manquer en Europe en 2014, selon le classement annuel de l’éditeur de guides de voyages australien Lonely Planet. Soit la seule ville française à avoir été retenue. La politique des « grands sites », doublée de nombreuses initiatives, publiques et privées, semble enfin porter ses fruits. Et la visite espérée du Pape à Lourdes en 2015, l’extension du Stadium dans la perspective de l’Euro 2016, le déménagement du Parc des expositions en 2018, l’arrivée du TGV... sont autant de projets qui devraient, eux aussi, concourir au dynamisme du secteur.
Un marché porteur
Un secteur difficile à cerner en termes d’emplois. « Ils sont estimés à 50.000 dans la région, mais il est toujours très compliqué d’avoir une vision globale, car tout le monde n’y met pas la même chose, souligne Olivier Gérard, directeur de l’Agefos PME Midi-Pyrénées. Le tourisme pèse, dans tous les cas, beaucoup ! » A commencer à Lourdes, 2ème ville hôtelière de France, après Paris. « La cité accueille chaque année 6 millions de pèlerins ou visiteurs, l’offre hôtelière restant stable malgré d’importantes mutations liées à la mise aux normes de nombreux établissements, informe Philippe Martel, directeur de l’agence de Pôle emploi à Lourdes. Le tourisme est sans conteste un secteur de premier plan pour le département des Hautes-Pyrénées, l’activité s’articulant autour de quatre saisons : été et hiver bien sûr, mais aussi thermale et lourdaise. » Il présente également des spécificités à Toulouse. « Deux tiers des nuitées sont toujours le fait du tourisme d’affaires, en lien avec l’économie (la recherche, l’aéronautique, la santé...) et l’organisation de congrès et de salons, rappelle Jean-François Renac, directeur général de So Toulouse Convention Bureau, la structure en charge de promouvoir et de soutenir l’organisation de congrès et de conventions dans la ville Rose. Un secteur très complémentaire au tourisme de loisirs, l’ensemble du marché ayant connu une forte progression ces dernières années, tant en termes de chiffre d’affaires que de capacité d’accueil, puisqu’ils ont augmenté de 25%, soit une croissance supérieure à celle enregistrée par les autres villes. »
Priorité à la fidélité
Porteur donc, mais pour quels types de profils ? « Ce sont toujours les mêmes métiers qui arrivent en tête des demandes : serveurs, cuisiniers, vendeurs... », répond Philippe Martel. « L’animation génère également toujours beaucoup d’emplois, mais de courtes durées », ajoute Olivier Gérard. Des emplois saisonniers, sur des métiers jugés difficiles, autrement dit, les ingrédients classiques d’une gestion des ressources humaines compliquée... Pas tant que ça, corrigent plusieurs invités. « Nous ne rencontrons pas trop de problèmes à pourvoir les offres, rapporte ainsi Philippe Martel. La seule difficulté est liée à la mobilité, car les employeurs des stations ne peuvent généralement pas loger leurs saisonniers, ce qui restreint les possibilités de recrutement aux locaux. »« Le secteur a également beaucoup évolué, la priorité étant aujourd’hui de fidéliser les salariés, poursuit Jean-François Renac. C’est très net dans les grands groupes, qui ont mis en place des actions de fidélisation qui démarrent dès les stages et les contrats en alternance, et challengent même financièrement leurs managers sur cet aspect. C’est plus compliqué pour les PME... » « Nous l’observons aussi de plus en plus sur les emplois saisonniers, proposés, d’une année sur l’autre, prioritairement aux personnes qui ont déjà été salariées, et donc souvent formées, confirme Olivier Gérard. Si beaucoup d’offres d’emploi sont de courtes durées, les saisonniers ont ainsi désormais plus d’opportunités d’enchaîner les contrats et de travailler durablement dans le tourisme. » A l’instar des freelances, qui multiplient les missions.
Une externalisation croissante
Le secteur semble d’ailleurs avoir de plus en plus recours aux prestataires extérieurs pour des tâches jusqu’alors gérées en interne. Stéphane Pelegry, directeur du développement de l’agence de portage salarial RH Solutions, à Toulouse, en témoigne : « Le tourisme est en effet une activité qui se développe, au même titre que d’autres, dans le secteur du portage salarial, car il répond au besoin de sécurisation des professionnels, et séduit dans le même temps les employeurs qui ont besoin d’avoir recours à leur expertise, mais ne souhaitent pas voir leur masse salariale augmenter, notamment les petites sociétés. Donc, oui, nous avons de plus en plus de portés qui vendent leurs services aux agences de voyages ou aux tours opérateurs, comme des guides accompagnateurs, des interprètes, des responsables d’accueil... Mais parfois aussi des profils plus atypiques. Nous voyons également émerger de nouveaux profils, comme ceux d’organisateurs de salons. » Une tendance à l’externalisation qui devrait être croissante. « Les métiers de l’animation vont se développer de plus en plus sur ce modèle de missions ponctuelles, confiées à des indépendants spécialisés », estime Jean-François Renac. Pour des raisons économiques, structurelles (besoins ponctuels), mais également d’expertises attendues, les besoins étant de plus en plus pointus. « On assiste certes à une professionnalisation des structures, notamment au niveau du management », confirme Jérôme Flous, directeur formation de l’IRTH (Institut régional du tourisme et d’hôtellerie) de Tarbes, l’un des deux pôles de formations spécialisés dans l’hôtellerie restauration de la Chambre de Commerce et d’Industrie Midi-Pyrénées.
De la sueur, du sang et des larmes
"Le second, The Village, se situe à Saint-Affrique, poursuit Anne Bibet, chargée de mission emploi formation à la CCI Midi-Pyrénées. Il est spécialisé dans les métiers de l’animation pour les clubs de vacances, animation sportive, spectacle, son, lumière... L’offre est donc très spécifique, son recrutement étant d’ailleurs national. Très opérationnelle aussi, toutes les formations étant dispensées en contrats de professionnalisation avec les tours opérateurs. Une licence professionnelle « NTIC appliquées au tourisme » ouvre également à la rentrée en Aveyron en contrat de professionnalisation en partenariat avec l’ISTHIA (Université Toulouse 2). Les Centres d’études de langues axés sur les langues professionnelles, contribuent également au développement du tourisme." Un petit aperçu du très large panel de formations menant au secteur.
Des formations conformes aux attentes des entreprises ? Réponses mitigées... « Dans le cas de l’hôtellerie restauration, nous sommes toujours confrontés à un problème d’orientation, avec des jeunes qui viennent par défaut, puis abandonnent. Mais aussi de contenu, certaines formations étant totalement déconnectées de la réalité du marché », estime Jérôme Flous. « Il y a également un problème de perception, le tourisme étant appréhendé comme un secteur »fun« par les jeunes, qui ne savent pas ce que recouvrent vraiment les métiers, ajoute Marie-Pierre Sarret, responsable Sud-Ouest du cabinet Menway Carrières. Pour bon nombre d’entre eux, le tourisme est réduit à la seule activité communication / évènementiel, alors que cela reste une niche. » « C’est vrai, regrette Jean-François Renac, l’essentiel des métiers relèvent plutôt de la logistique. J’ai coutume de dire que le strass et les paillettes sont pour le client, alors que pour nous professionnels, ce serait plutôt la sueur, le sang et les larmes ! Nos métiers sont exigeants et les compétences attendues de plus en plus pointues. L’essor du e-tourisme nous l’a d’ailleurs rappelé ! C’est pour cette raison que nous avons travaillé avec TBS à la mise en oeuvre d’un Master 2 Chef de projet évènementiel. Un projet pilote monté dans le cadre du cluster Tourisme d’affaires, dans le but de répondre au besoin du marché, mais aussi faire de Toulouse un pôle d’excellence en matière de tourisme. »
Plus de formations continues
Afin d’inscrire durablement les saisonniers dans l’emploi, plusieurs actions sont également menées pour les aider à se doter de nouvelles compétences. « Dans la perspective du futur Compte personnel de formation, nous mettons par exemple en place une plateforme e-learning qui nous permet d’élargir notre offre, de combiner présentiel et enseignement à distance, mais surtout de nous adresser à un public plus large, informe Anne Bibet. Car le problème des saisonniers, c’est qu’ils ne peuvent généralement pas bénéficier de financement entre deux contrats. » « Sauf dans les Hautes-Pyrénées où de nombreux acteurs (Conseil général, Opca, Pôle emploi...) se mobilisent pour proposer des formations aux demandeurs d’emploi, nuance Jérôme Flous. Nous avons par ailleurs intégré le e-tourisme, devenu incontournable, dans toutes nos formations afin d’accompagner l’évolution des besoins. » Le directeur de Pôle emploi Lourdes observe justement l’émergence de nouvelles attentes des entreprises en matière de formations. « Pour sensibiliser leurs salariés à la sécurité au travail, aux postures, mais aussi au respect de l’environnement, rapporte Philippe Martel, qui a assisté à une importante structuration des services ressources humaines des établissements. Les entreprises sont certes soumises à davantage d’obligations sociales et sociétales. » « Nous allons précisément élaborer une carte dans ce sens en partenariat avec Véolia », indique Jérôme Flous. Autant d’initiatives qui concourent à la professionnalisation du secteur, à la qualité de service apporté aux clients, à l’attractivité de la région, et, pour finir, au dynamisme du tourisme en matière d’emplois !
Ingrid Lemelle
Photos Hélène Ressayres - ToulEmploi.
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