Comment l’Insa Toulouse va-t-elle passer le cap de la soixantaine ?

Vendredi 22 septembre, l’Insa Toulouse fêtera comme il se doit ses 60 ans. Après la grande soirée d’anniversaire, pas question de se reposer sur ses lauriers : si la vision de son père fondateur Gaston Berger reste le pilier de sa philosophie, l’école a retravaillé ses programmes en profondeur pour former les ingénieurs de demain dans l’excellence et la diversité. Bertrand Raquet, directeur de l’Insa Toulouse, nous expose ses enjeux.

En 1963, l’Institut National des Sciences Appliquées de Toulouse voyait le jour. Comment l’école va-t-elle passer le cap de la soixantaine ?
60 ans, c’est une belle étape et ça se fête ! Vendredi 22 septembre, une scène ouverte sera installée sur le campus avec de nombreux spectacles. Cette journée sera aussi l’occasion pour nous de faire communauté, de rendre hommage à ceux qui ont façonné l’Insa, ceux qui ont construit son modèle et ceux qui le font vivre, le personnel, les enseignants et les chercheurs, les 19.000 alumni et les 3300 étudiants de Toulouse. L’occasion aussi de se féliciter de la place de l’Insa dans le monde de l’enseignement et sur son territoire. On souhaite que ces retrouvailles s’expriment avec les valeurs qui nous unissent.

Justement, quelles sont ces valeurs ?
Un peu d’histoire. A la fin des années 1950, Gaston Berger, industriel et philosophe, se voit chargé par le ministère de "massifier" la formation d’ingénieurs en France afin de répondre aux besoins industriels. De là, il a créé ce modèle inclusif qui nous est cher, en rupture totale avec le courant de l’époque et qui s’articule autour de trois piliers. D’abord, montrer que l’on peut former les meilleurs ingénieurs sans passer par une classe préparatoire, qu’il considère comme un premier frein à la mixité sociale. En parallèle, s’implanter en province et prouver que cette diversité se trouve aussi dans les territoires. Dans les années 1960, les meilleures formations, voire les seules, sont à Paris. Enfin, intégrer les sciences humaines et sociales au parcours de l’ingénieur jusqu’alors uniquement centré sur la technique. Ces trois "ingrédients", très novateurs pour l’époque, restent d’actualité et forment toujours le socle de valeurs des sept Insa français.

Ce modèle cher à l’Insa doit-il néanmoins évoluer pour s’adapter aux nouveaux enjeux ?
Bien sûr. La transition socio-écologique est au cœur de nos métiers. En 2019, nous avons relancé une démarche prospective qui a abouti à une refonte totale des programmes. Les nouvelles maquettes déployées depuis ce mois de septembre contiennent des enseignements inédits, par exemple l’anthropocène, la biodiversité ou encore l’analyse d’un bilan carbone. Les matières ont été revisitées pour intégrer la question écologique, désormais inhérente à tous les domaines mais également d’autres sujets prégnants comme l’intelligence artificielle. Nous avons aussi réorienté nos objectifs de recherche. Enfin, l’amélioration de notre modèle social est au centre de nos préoccupations.

L’Insa, école publique, est reconnue pour son inclusivité. Quels sont les axes de progrès ?
Pour éviter de reproduire une élite, nous devons nous ouvrir encore sur les diversités, notamment accueillir mieux et plus nombreux les publics issus de milieux sociaux défavorisés. Le taux de boursiers, bien qu’élevé (autour de 30%), se dégrade. De fait, nous pensons que la sélection étant de plus en plus difficile, certains n’osent même plus postuler : le groupe reçoit près de 30.000 candidatures chaque année pour 2500 places. Cet indicateur nous alerte et nous ouvrirons en 2025 une voie de recrutement – environ 10% des places - réservée à des cohortes identifiées dans des lycées ruraux ou situés dans les quartiers prioritaires, que nous accompagnerons aussi spécifiquement pendant leurs études. En parallèle, nous poursuivons nos actions pour la mixité : malgré un excellent taux de 43% d’étudiantes en première année, la situation est très hétérogène : 85% de filles en spécialité biotechnologies, 15% seulement dans le numérique. Il reste beaucoup à faire.

En résumé, c’est quoi, un Insaïen ?
Gaston Berger nous a légué sa conception de l’ingénieur comme d’un « philosophe en action », quelqu’un qui ne se contente pas de bien faire mais se pose avant tout des questions : pourquoi le faire ? Quel sera l’impact pour les personnes et pour la société ? Comment cette innovation participera-t-elle à améliorer le monde ou le quotidien des autres ? Un Insaïen, une Insaïenne, sont des esprits critiques et éclairés, conscients de leur responsabilité sociétale et qui jouent en collectif.
Propos recueillis par Marie-Dominique Lacour

Sur la photo : Bertrand Raquet, directeur de l’Insa Toulouse. Crédit Insa.

1 Message

  • MICHEL AGUILAR le 19 septembre 07:50

    Bonjour à toute l’Équipe,
    Merci de me donner l’opportunité de ma remarque : A force d’orienter les étudiante-s vers la socio-écologie, on les pousse à l’irresponsabilité en ce sens qu’il est bien plus facile de s’opposer au progrès technologique que de s’investir dans les solutions technologiques. Car si c’est l’ingénieur-e qui à créée la pollution par toutes ses machines, c’est à l’ingénieur-e de réaliser, d’imaginer les solutions d’une technologie propre !

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Source : https://www.toulemploi.fr/Comment-l-Insa-Toulouse-va-t-elle-passer-le-cap-de-la,39231